LE ROTTWEILER
Copyright Joseph ORTEGA
C’est un molossoïde solide et
réfléchi, alliant la puissance à l’interprétation intelligente des événements.
Le Rott possède sans conteste
beaucoup de personnalité. Des épaules de débardeur avec une musculature
impressionnante un aspect dissuasif évident, ce Bouvier Allemand a pourtant ce
regard tranquille et franc, de ceux qui portent sur le monde qui les entoure,
une assurance que peut seule donnée la conscience de sa force.
Sous cette apparence, nous
avons affaire à un monsieur de la gente canine avec un caractère trempé dans
l’acier. Le fait que la race soit à la mode n’est pas une très bonne chose, car
certains élevages produisent des sujets dans le seul but de la vente, sans se
préoccuper des exigences du standard, tant du point de vue physique que
psychique. Il ne faudrait pas que ce magnifique chien perde ses qualités
d’équilibre caractériel, de prouesses physiques, de chien d’utilité, où le beau
devrait toujours être allié au bon. D’autre part, il faut dire de manière
claire, à ceux qui seraient tentés d’en faire leur compagnon dans la famille,
qu’il n’est pas fait pour les maîtres sans expérience, il n’est pas qu’une
apparence agréable pour son aspect imposant le respect, il est également une
somme de puissance contenue qu’il faut savoir diriger.
La progression de la race
depuis une dizaine d’années est en passe de la faire devenir très populaire
dans le monde entier, mais tous les pays maîtrisent-ils aussi bien son
développement que le Club de la race en Allemagne ?
Son histoire :
Il est le descendant des très puissants molosses de guerre
et de combat, venus d’Assyrie et d’Epire. Ce « Canis pugnaces » a été
le favori des légions de la Rome antique qu’il accompagnera dans leurs
conquêtes. On a pu retracer son périple, en suivant la progression des armées
romaines, en particulier par la Suisse, où au passage il servit à créer des
Bouviers comme le Grand Bouvier Suisse, l’Entlebuch, l’Appenzell, le Bernois. A
partir de Schaffhouse, il pénétra en Allemagne dans le Lander du Bad Wurtemberg
pour établir à Rottweil, nommée alors, Area Flaviae, ou ville rouge. En
arrivant son rôle était de conduire et de maîtriser les troupeaux de bœufs,
servant à nourrir les armées, à garder les campements des soldats contre toute
surprise des attaques ennemis, à servir d’éclaireur pour pénétrer dans les
territoires inconnus, à surveiller les prisonniers, à combattre en première
ligne pour effrayer et défaire la cavalerie…. Sur place, des croisements furent
opérés à partir de Dogues, descendants des envahisseurs barbares, comme les
Alains.
La région de Rottweil a
toujours été un important carrefour pour les marchés aux bestiaux et, du rôle
de combattant, le Rott passa à celui de Bouvier, presque exclusivement. Pour
avoir plus de maniabilité et d’endurance, en allégea sa silhouette, en mélangeant
plusieurs races qu’on trouvait alors autour des troupeaux, peut importe si
celles-ci venaient de Suisse, de France ou d’Allemagne même, le seul critère de
sélection demeurant les qualités à la fonction.
Il prit le nom qui qualifiait
celle-ci et, comme il était utilisé par les bouchers, on le nomma « chien
de boucher » (Metzgerhund). Déjà à l’époque on louait son calme et son
assurance pour conduire et s’imposer face aux bovins les plus récalcitrants,
sans abîmer les gigots, de même qu’on lui attribuait un sens aigu de la garde
pour tout ce qui appartenait au maître, à tel point que les maquignons qui
rentraient du marché après une vente fructueuse, n’hésitaient pas à lui
attacher au cou, dans une bourse de cuir le produit de celle-ci, dans le cas où
ils se seraient fait attaqués par des malandrins. En 1860, la route sera
interdite à la circulation des troupeaux qu’on obligea à emprunter le chemin de
fer, ce qui allait sonner le glas de ces bouviers et bergers à quatre pattes
réduits au chômage.
La race est alors bien
connue, elle prend d’ailleurs le nom de son lieu de création, puisqu’on
l’appelle chien de Rottweiler. La cynophilie était en route sur le modèle des
anglais et le premier sujet portant le nom de Rottweiler, sera présenté en
1892, à l’exposition canine de Heibronn. L’artiste peintre Albert Kull,
passionné par la race, va rédiger un premier standard en 1893 qui sera publié
en 1901. Il réunira les amateurs régionaux pour fonder un Club de race, en
1899, et promouvoir la race en particulier, comme chien de police. C’est
l’époque des premiers concours pour chiens de garde et de police, et le Rott
occupe une place de choix dans ces prestations. Une réunion des races canines
est organisée par Karl Knauf à Heidelberg en 1905, c’est un Rottweiler qui remporte
le premier prix, il s’agit de Russ vom Bruckenbuckel appartenant à un éleveur
de Teckel, nommé Albert Graf, qui défendit si bien la race plus tard. Il créera
en 1907 le DRK ( Deutsches Rottweiler Klub, mais déjà des dissensions
apparaissent entre amateurs et, la même année, un nouveau Club apparaît, le
SDRK (Süden Deutscher Rottweiler Klub) présidé par un commissaire de la police
criminelle, Jacques Ackerknecht. Des éleveurs vont d’ailleurs faire la
promotion de la race comme chien de police, en 1908, il s’agit de Walter
Schnader et de Otto Kell (élevage von Holstein).
En 1913, le SDRK va devenir
l’IRK ( International Rottweiler Klub, ce qui prouve que la réputation du Rott
a déjà dépassé les frontières allemandes.
La guerre de 14-18, va
trouver dans la race un chien apte à toutes les missions, aussi bien pour
porter les munitions, pour tirer les mitrailleuses, pour le transport des
médicaments, pour la garde et la patrouille.
Après le conflit armé, le
Rott a beaucoup diminué en effectif et les éleveurs s’attachèrent à
reconstituer le cheptel, d’autre part il fallait cesser ces querelles entre
amateur de la race qui pouvaient lui porter préjudice, une union sacrée aura
lieu le 14 août 1921, du DRK, presidé par O. Hell, et de l’IRK, présidé par R.
Schrader. C’est la création de l’ADRK, l’association qui réunira tous les
éleveurs (Allgemeine Deutsches Rottweiler Klub). Cette démarche sera bénéfique
puisque dès 1925, le livre des origines de la race (zuchtbuch) compte environ
13600 sujets. Comme le Club du Berger Allemand qui sert de modèle, l’ADRK va se
structurer en délégations représentant les landers du pays et veillant à
l’application des directives afin de conserver l’unité. L’ADRK commence à
instaurer des épreuves de sélection, car un chien ne peut prétendre au titre de
Champion que s’il est également chien de police. La cynophilie allemande va
commencer à se réunir, toutes races confondues, en 1933 dans la constitution du
Reichsverband. Hélas, la seconde guerre mondiale va porter un rude coup aux
effectifs des chiens d’utilité, qui vont être employés sur tous les fronts, le
Rott aura la spécialité, entre autre, de garde-frontière, afin de pister et de
retrouver les évadés où pour ramener ceux qui essayaient de franchir le Rhin à
la nage.
La paix revenu, l’ADRK fit
son possible pour reconstituer la base d’élevage et en 1960 la livre des
origines comptabilise depuis la création, 40.000 sujets inscrits. La race va
s’épanouir et en 1968, le contrôle systématique des hanches pour la détection
de la dysplasie coxo-fémorale est obligatoire.
Le 26 Mai 1969 un organisme
international de la race est créé, c’est l’IFR ( Internationale Federation für
Rottxweiler Freunde). La croissance de la race va se faire doucement mais
sûrement, car si on compte 942 adhérents à l’ADRK en 1950, en 1982 ils sont
3800. C’est alors le coup de foudre pour la race et des sujets sont exportés
dans plusieurs pays, en 1989 le club compte 5400 membres. Être à la mode, c’est
être en danger pour une race et peut-être devenir le cible de ceux qui ne
connaissent rien aux chiens mais sont prêts à mettre en application un
« délit de Sale Gueule », aussi en 1990 le test de sociabilité (BH)
va devenir obligatoire pour démontrer l’équilibre caractériel. La sélection, au
vu de la base très large d’élevage va se faire plus sévère, tant du point de
vue des tares génétiques que du caractère.
L’ADRK instaure un ZTP,
examen pour être autorisé à la reproduction, qui prend en compte tous les
paramètres physiques et psychiques, ainsi que, pour ceux qui réussissent le
ZTP, la körung. Une sélection draconienne qui exige tout d’abord que les mâles
possède un titre de travail Schutzhund III ou IPO III ( qualificatif TB ou EXC)
et pour les femelles le Schutzhund I ou IPO I, ensuite d’excellente radio des
hanches et des coudes, un examen de caractère avec épreuves de mordant….
En France, la race est connue depuis les années 20, le
premier Rott à avoir été inscrit au LOF se nommait Barry d’Oberhausbergen et
appartenait au premier éleveur français, M. Hetterich qui cessera son élevage
en 1939. Le Club Français du Rottweiler est créé en 1977, il sera affilié en
1983 et va regrouper les éleveurs qui comprennent que la race va prendre son
essor. La progression va être éloquente ; en 1994 on compte 2053
inscriptions au LOF, en 1996 : 3446, en 1999 : 5351…
Vie Sociale et
Education :
Il faut noter une caractéristique de la race, c’est la
différence quelquefois énorme qui existe entre les sujets mâles et femelles. Si
les premiers sont de vrais durs ayant presque toujours besoin d’un maître ayant
de la poigne et sachant s’imposer en fixant des limites, très mordeurs à
l’entraînement pour la préparation au mordant sportif de la compétition,
pisteurs acharnés, mais peu enclins à l’obéissance (ce qui signifie pour eux
soumission »), les secondes sont douces et aimables, très près de la
famille avec une soumission naturelle au chef de meute, bonnes pisteuse, avec
une obéissance facilement acquise mais peu de goût pour l’attaque malgré un
excellent mordant.
On peut résumer son caractère en disant, que c’est un
individu très sûr de lui et de sa force, ce qui engendre un calme olympien, et
il lui faut un moment avant qu’il ne se mette en colère. Face à des situations
nouvelles, là où beaucoup d’autres races manifestent de la crainte, lui se
contente d’observer et d’analyser, allant si possible au contact pour tester ce
qu’il ne connaît pas. En ville il porte un regard tranquille sur ce qui
l’entoure, quels que soient les bruits ou les mouvements et s’adapte facilement
à toutes les situations, que ce soit dans un hall de gare surpeuplé ou pour se
coucher au pied du maître au restaurant.
Bien-entendu, il faut avoir conscience qu’il est de
tempérament dominant (surtout le mâle) et que la hiérarchie au maître et à la
famille doivent se préparer en profondeur depuis le plus jeune âge. Ce qui
signifie des interdits dans la maison et des exercices de soumission, où il
doit reconnaître l’autorité du chef de meute. Parallèlement à cela, son
éducation en obéissance doit être assez souple, pour ne pas casser son
caractère et lui conserver sa personnalité, tout en le soumettant aux ordres.
Il faut se souvenir que comme beaucoup de molossoïdes, sa maturité sera assez
tardive (vers 3 ans) et qu’il est inutile de vouloir l’obliger par des méthodes
brutales. Il apprend lentement mais il retient bien, surtout si les ordres qui
incitent à l’exercice sont associés avec de l’agréable.
Dans la maison il sait garder sagement sa place et il
n’est pas du genre pot-de-colle, toujours « scotché » au maître,
l’essentiel pour lui c’est d’être là et d’observer ce qui se passe.
Les enfants trouveront en lui un grand frère à quatre
pattes, calme et patient, qui rassure, et il adorera jouer avec les plus grands
tout en mesurant sa force. Les maîtres doivent faire la leçon aux plus petits,
afin qu’ils ne le dérangent pas lorsqu’il dort ou mange sa gamelle et qu’ils ne
lui fassent pas de mal avec un bâton ou en lui lançant des cailloux.
C’est un excellent gardien qui a fait depuis longtemps
ses preuves, avec cet avantage indéniable, c’est que ce n’est pas un excité et
qu’il n’interviendra pas pour rien, simplement par crainte, comme beaucoup de
roquets.
Avec les autres chiens il faudra entretenir une
socialisation depuis le plus jeune âge, surtout entre mâles, en le condrontant
régulièrement à des chiens calmes et soumis qui ne cherchent pas à tester leur
autorité, car c’est là un gros défaut de la race, c’est que les mâles n’aiment
pas se soumettre.
Dans son éducation de base, on intégrera le port de la
muselière qui est obligatoire pour les chiens de seconde catégorie, en
associant celle-ci à une friandise ou à un jeu afin qu’il s’y accoutume sans
réticences.
Le Rott est une race soumise au travail et comme telle
peut pratiquer la compétition aussi bien en obéissance qu’en pistage ou au
mordant sportif. Certains sports canins lui vont mieux que d’autres, c’est
ainsi que s’il ne correspond pas au profil que l’on recherche en programme Ring
Français, où il faut de la légèreté, de la vitesse, de la nervosité, il est par
contre très à l’aise dans le programme de son pays le « Schutzhund ».
Celui-ci a été adopté par tous les pays du monde et est devenu international,
c’est le RCI ou IPO, qui a gardé l’esprit du programme originel, c’est-à-dire
être capable de sélectionner les chiens qui présentent les meilleurs qualités
dans tous les domaines. Il y a d’abord la piste, où le Rott est très à l’aise
car c’est un acharné, avec le sens de la traque. Lorsqu’il suit les molécules
odorantes, le nez collé au sol, avançant avec lenteur et puissance sur tous les
terrains (labours, herbe, sable, etc.) comme un véritable 4X4, ce n’est pas
vraiment pour le maître qu’il le fait mais pour son propre plaisir. En classe 3
du RCI, il aura à pister une heure après que le tracé soit fait et retrouver 3
objets minuscules déposés sur celui-ci. Lorsque j'ai lancé la Recherche
Utilitaire en 83 (Revue Chiens Sans Laisse), lors du lancement de cette
discipline, le premier concours jugé par Jacques Bouteloup dans mon club Cercle
Canin Provençal, le seul qui a réussit était un Rott que j'avais formé…
Contrairement au
pistage français, la tenue de piste du chien est très importante, il faut qu’il
soit calme et assuré, ne s’écarte jamais et ne relève pas la tête pendant le
travail.
Ensuite il y a l’obéissance où le chien doit être rapide
et joyeux, tout en formant une équipe soudée et harmonieuse avec son maître
pour chaque exercice. C’est là où les méthodes d’éducation vont être très
importantes. Soit on utilise la contrainte, comme pour certaines races
bergères, et alors on obtient des exécutions lentes et sans âme, car le Rott
n’aime pas être écrasé comme un esclave ; Soit on travaille dans la joie
et on se sert de motivation pour l’inciter à obéir, en allant doucement et en
répétant souvent et peu de choses à la fois, et alors vous le verrez réagir
avec l’œil brillant donnant toute son énergie pour pratiquer chaque exercice.
Enfin il y a le mordant sportif qui est sans doute la
partie qu’il préfère entre toutes, on peut dire qu’il a un mordant naturel et
puissant avec un sens du combat particulier de gladiateur. Là où un Malinois
rentrera comme un bolide dans la toile sans réfléchir, dérapant souvent au
moment de l’impact, le Rott va arriver à la vitesse d’un cheval au galop mais
analysera en un dixième de seconde la situation pour ne pas rater sa prise et
saisir de manière ferme. Sa combativité n’est plus à démontrer, et les hommes
d’attaque ont du mal à gérer tant de puissance, ce n’est plus l’homme qui
entraîne le chien mais le contraire…. Lors d'un premier sélectif pour le Championnat
de France RCI, qui s’était déroulé à Bergerac, il y avait 4 Rotts qui participaient.
Pour pratiquer les sports canins il faut se rendre dans
un des Clubs de France, le Club de race ou la Société Centrale Canine en
détiennent la liste.
Son entretien :
Nous avons affaire à un chien d’utilisation, c’est à dire
qu’il a été sélectionné pour vivre à l’extérieur par tous les temps, son
entretien va se résumer à un brossage deux fois par semaine, que l’on termine
par un lustrage du poil à l’aide d’un chiffon de flanelle.
Son avenir sera celui que les vrais amateurs de la race
vont lui faire ; la demande de chiots est très importants, ce qui engendre
une production quelque fois anarchique, le fait qu’il soit en seconde catégorie
le fait choisir par les individus louches des cités (avec d’autres races comme
le Dogue Argentin) qui se débarrassent de leur Pit-Bulls à l’avenir très
sombre, dans certains pays il devient une bête de show ce qui entraîne
l’exagération des caractères du standard pour produire de véritables veaux aux
masses musculaires suspectes….
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, on le voit très
à la mode et même souvent numéro 1 dans des pays qui le connaissent depuis peu
( Argentine, Brésil, Espagne) alors que dans son pays il serait plutôt en
baisse.
En résumé :
On peut dire que le Rott est vraiment ce qu’il paraît, un
chien d’utilité avec un caractère bien trempé. Il n’est pas à conseiller pour
les maîtres néophytes, surtout le mâle. Enfin méfiez-vous de certains élevages
dont vous pourrez lire les annonces un peu partout dans les journaux locaux,
demandez des renseignements à la SCC ou au Club de race. Si vous désirez avoir
un chien bien dans sa tête et sa peau, faites du sport avec lui et inscrivez
vous dans un Club.
Dans son pays L’ADRK est un exemple pour les Clubs de
race de chiens d’utilité.
Pour reproduire il faut passer des tests et divers
examens.
Le ZTP :
C’est l’autorisation pour la reproduction, l’équivalent
de notre confirmation mais beaucoup plus poussée.
Il sera jugé sur sa morphologie ainsi que sur son
caractère.
Le BH :
C’est un Brevet de chien de compagnie avec des épreuves
de résistance au stress, d’obéissance et de sociabilité aux humains et aux
autres chiens.
L’AD :
Une épreuve d’endurance sur 20 Km.
La Körung :
Un examen très pointilleux pour estimer la construction
anatomique, le caractère, les performances et déterminer les aptitudes
particulière à conserver et à améliorer la race.
Le KS
Klubsiegerzuchtschau :
Championnat
d’élevage.
Le ES
Europasiegerausstellung :
Exposition toutes races
Le BS Bundessiegerzuchtschau:
Championnat de la Société Canine Allemande, le VDH. Le DM-Sch Deutsche Meisterschaft für Sport
und Schutzhund
Championnat de travail
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